J'étais sortie pour aller découvrir la ville, pendant la nuit, parce que j'aimais beaucoup observer les étoiles et marcher dans la rue avec toutes les petites lumières des commerces qui avaient préparé Noël un mois à l'avance. Je me surpris moi-même à vouloir y aller seule, alors que les personnes avec qui j'avais fait connaissance  auparavant me paraissaient gentilles... bah, c'était sûrement parce que j'étais naturellement solitaire. Je déambulais, au hasard, sans me demander où je me dirigeais, ni même comment j'allais retrouver mon chemin. Je me consacrais uniquement à mes pensées pour l'instant. Mon arrivée à la pension, Shimizu et Haiko, la chambre et plein d'autres choses encore. Je m'efforçais évidemment, comme depuis l'incident de la terrasse, d'arrêter de penser à mon passé. Il ne devait pas prendre autant de place dans ma nouvelle vie, bien que je n'aie aucune envie de l'oublier. C'est alors qu'en voyant un vitrine extrêmement lumineuse, je me demandai si je devais offrir des cadeaux à mes nouveaux amis pour Noël. Il était peut-être un peu tard pour faire des emplettes, mais j'en avais très envie. Je ne savais d'ailleurs même pas si eux me considéraient comme une amie... c'est alors que j'aperçus une boutique de vêtements encore ouverte, et me décidai à entrer.
L'atmosphère était très agréable, il y faisait chaud, et il n'y avait plus personne à cette heure. Personne, à part cette brune là-bas...

Alors qu'il me restait du temps libre avant de gagner mon emploi au karaoké, je trainais en ville, découvrant les rues illuminées, les boutiques aux couleurs rouge et or, bleu et argent ou avec un sapin extrêmement coloré. Décidant de m'offrir une écharpe, pour ne pas tomber malade dans cette ville où la neige ne tarderait sans doute pas, je gagnais un magasin où les mannequins de la vitrine s'affichaient en veste, chaude ou en tenue festive. Noël. C'était bientôt la date des cadeaux, la date où les amoureux se baladeraient dans les rues montrant leur amour. Je souris à l'idée de les croiser. Ils étaient heureux et je l'étais également en les voyant. Bref. J'étais entré dans le magasin, déclenchant le "diling" d'une clochette. Souriante, je me dirigeais de-çi, de-là, dans les rayons. Robes à paillettes qui me ferait passer pour une boule à facettes, jupe droite un peu trop autoritaire, veste colorée et cintrée qui me rendrait plus adulte... J'entendis à nouveau la clochette. Quelqu'un d'autre était entré dans la boutique. Tournant les yeux, je remarquais une jeune fille aux longs cheveux blonds. Pas loin d'elle, les écharpes me firent de l'oeil...

Gagnant d'un pas rapide l'étagère où diverses écharpes avaient été posées, je passais devant la demoiselle lui coupant finalement la route. M'apercevant de mon impolitesse, je me retournais vers elle.

"Désolé."

Je me mis à sourire.

"C'est juste que... Cette écharpe n'est-elle pas magnifique ?"

J'avais pris une écharpe légère ressemblant plus à un foulard qu'à une grosse écharpe d'hiver. Elle était composé de fleurs et, cela aurait été le parfait cadeau pour ma grand-mère tellement le motif était démodé. Je regardais alors l'écharpe que je montrais.

"Euh... non... Pas celle-là..."

Un sourire de l'inconnu fit pétillé mes yeux de joie, lorsqu'elle m'ôta l'étole des mains. Le tissu frôla mes mains avant de gagner l'étagère. La demoiselle avait-elle pris le soin de plier le foulard ? Je ne sais. Son sourire m'avait donné envie de poursuivre la conversation avec elle. Elle semblait être une personne calme, réservée et certainement plus mature que je l'étais. D'ailleurs, lorsqu'elle prit sur l'étagère une nouvelle écharpe, je constatais qu'elle était légèrement plus grande que moi mais correspondait au physique d'une étudiante comme moi. S'approchant de moi, elle enroula une écharpe autour de mon cou avant de se reculer. La chaleur de ce que l'on peut qualifier d'accessoire, m'enveloppa un instant. Certains de ses mots étaient parvenus jusqu'à moi. Notamment que cela m'irait. J'eus un sourire béa en découvrant dans un miroir l'écharpe enroulée sur moi. Elle était si chaude, si douce, si belle... Je m'avançais et attrapais les mains de l'inconnue.

"Merci ! Elle est magnifique !"

Alors que mes yeux scintillaient de mille feux, tellement la joie d'avoir trouvé quelque chose m'allant fut immense, je relâchais ma prise.

"Ah ! Combien vous dois-je ?"

J'affichais cette fois-ci un regard interrogateur. Puis, un doute s’immisça en moi.

"Vous êtes bien vendeuse ici, non ?"

Et zut ! Je venais de faire une erreur. Je souhaitais m'excuser mais, elle se dirigea vers la caisse. Elle devait sans doute chercher la vendeuse. Ses dires me donnèrent d'ailleurs raison. Je fis quelques pas, abaissais mon buste en avant dans un angle de 45° et fermais les yeux.

"Je suis désolée."

Ma voix résonna dans la boutique, d'après ce que j'entendis. Avais-je parlé si fort ? Non... Ce n'était pas ma voix. Enfin... Elle ne semblait pas être mienne. Me remettant droite, je remarquais une femme sortant de l'arrière boutique. La réserve certainement, avais-je pensé. Je m'approchais de l'inconnue qui m'avait précédemment aidé dans le choix d'une écharpe. Un air chaud me fit m'arrêter. Je me trouver sous la climatisation réversible et l'écharpe voltigea légèrement grâce au souffle chaud. Quelques mèches de mes cheveux en firent de même. Fermant alors les yeux, je câlinais de ma joue l'écharpe, la tenant d'une main. Douce. Toujours. Enfin, il me fallut revenir à la réalité et rejoindre la jeune blonde. La vendeuse s'approcha du comptoir où stagnait une caisse enregistreuse. J’ôtais l'accessoire, frissonnais faiblement et la posais sur le meuble séparant la vendeuse de nous. En attendant que cette dernière me donne le prix, je me tournais vers la demoiselle salvatrice que j'avais prise pour une employée.

"Comment tu t'appelles ?"

Un sourire sympathique s'esquissa sur mon visage.

Répondant à ma question en ajoutant qu'elle venait d'arriver en ville et qu'elle étudiait à la pension Hinata, la dénommée Lenalee Aibu me fit passer d'un simple sourire à un autre émerveillé puis, à une bouche ouverte par la surprise. Le monde était petit. Hormis son nom et son prénom, j'aurais pu dire la même chose. Quoique je n'étudiais pas à la pension Hinata, j'y vivais. Avec plusieurs personnes que je n'avais pas encore rencontré. Pour preuve, je ne connaissais pas cette jeune blonde. La seule que j'avais croisé, qui détenait une chevelure semblable aux champs de blés, était Sena. Celle-ci était d'ailleurs vouée à devenir mon professeur d'arts martiaux. Bon. Il me fallait répondre.

"Je vis aussi à la pension Hinata ! Avec Shimi', Hiro', Sena, Haiko..."

Au fur et à mesure que je les citais, je les comptais sur mes doigts.

"Ah ! Miku aussi... Je l'ai rencontré il y a peu..."

La vendeuse attendait que nous ayons fini notre conversation pour annoncer le prix de l'écharpe mais également pour conseiller la jeune cliente. Au moment où elle daigna ouvrir la bouche se fut pour la refermer immédiatement.

"Je suis Ruika Akatsuki... Appelles-moi simplement Ruika."

Je l'avais tutoyé si facilement que j'avais été surprise qu'elle en fasse de même en me répondant. Les gens avaient tendance à ne pas trop apprécier le tutoiement d'un inconnu. A croire qu'ils préféraient être considérés comme des gens d'un échelon social différent. Jetant un regard à la vendeuse, je sortis de mon sac un porte monnaie en forme de tête de chat. L'ouvrant, j'en sortis un pièce de 500 Yens que j'offris à la vendeuse afin de régler mon achat.

"Dis moi Lenalee... Pourquoi es-tu ici à une heure si tardive ?"

Je n'étais pas vraiment curieuse mais, j'espérais lui être utile autant qu'elle le fut pour moi.

La jeune femme m'informa que premièrement, elle connaissait Shimizu et Haiko, deuxièmement, elle vivait à la pension Hinata et, troisièmement, elle était étudiante à Todaï. Si elle savait que depuis mon arrivée, avec ces deux-là, il m'était arrivé quelques aventures, elle prendrait peut-être la fuite. J'opinais de la tête simplement lorsqu'elle me demanda si c'était également mon cas. Todaï, Hinata... Effectivement. La jeune vendeuse me tendit alors un sac contenant l'écharpe dont l'antivol avait fort heureusement disparu. Preuve que même sortant de l'arrière boutique, la jeune femme était en alerte vis-à-vis des attentes de ses clientes.
Répondant à ma question, j'écoutais Lenalee. Elle était arrivée tardivement et appréciait les décorations de noël déjà installées en ville. Trouvant cette période de l'année géniale, la jeune blonde me sembla enjouée. J'allais ajouter que cette période était plutôt pour les amoureux mais que je ne serais pas contre faire une fête à la pension lorsque la vendeuse se mit à rire. Me tournant vers elle, je décochais un grand sourire. Elle se gratta la gorge avant de proposer à mon accompagnatrice de l'aider dans ses recherches. Je m'apprêtais à prendre congé d'elles quand, j'entendis mon prénom. Celui de Shimizu vint ensuite. Apparemment, le cadeau concernait la gérante de la pension.

"Oui ! Pourquoi pas ! Mais... Je ne la connais que peu..."

Je m'avançais vers Lenalee, repensant à ma rencontre avec Shimizu. La première, je lui avais touché la poitrine, avais surfé sur le parquet et je l'avais laissé se rendre à Neverland avec Haiko. La deuxième fois... Je me mis à rougir. Nous étions nues au rotenburo. Comment pouvais-je aider une jeune fille de la pension à trouver un cadeau autre que de la lingerie ? Je m'éventais de ma main.

"Il fait assez chaud dans ce magasin..."

Oui. Il me fallait une excuse pour ces joues cramoisies. Brusquement, une odeur de cannelle me revint en tête. Affichant un énième sourire, le regard satisfait, je plongeais dans les yeux de la demoiselle.

"Ah ! As-tu remarqué que Shimizu sentait souvent la cannelle ?"

Shimizu dégageait toujours cette odeur qui embaumait nos narines et me donnait parfois faim. Comme cette fois-là au coin entre amis... Lenalee m'expliqua qu'il s'agissait d'une odeur subtile et, en découvrant ce qu'elle me montra, j'en déduis que mon aide était inutile puisqu'il s'agissait d'un pull bleu canard. Je me mis à rire en imaginant la gérante au pull assorti à ses cheveux. Ainsi, on ne différencierait plus sa chevelure du reste de son corps. Cela lui aurais fait un buste quasi-invisible compte tenu de sa petite poitrine et de ses courbes moins généreuses que celles de Sena. Tapant mon poing brusquement dans la paume de ma main, je cessais de rire.
Au rotenburo, Shimizu avait cherché à cacher plusieurs fois son corps. Peut-être avait-elle quelques complexes comme nous toutes ? Ainsi, il lui faudrait quelque chose pour se cacher du regard des autres.

"Pour la couleur, je ne dis pas non... Par contre, t'as pas peur qu'on ne distingue plus ses cheveux du reste de son corps ?"

J'attendis une petite réponse de la demoiselle avant de partir sur mon idée de cache-cache.

"J'ai remarqué que Shimi' se cachait très souvent... Enfin... Je veux dire..."

Comment expliquer ce qu'il nous était arrivé au rotenburo ? Bon. Allez. Sans prendre une once d'air, je décidais de dire pourquoi je supposais cela.

"Avec Shimi', nous nous sommes croisées au rotenburo et, puisqu'elle s'est un peu cachée derrière ses cheveux, je pense qu'elle a un peu honte de son corps... En sachant cela, tu pourrais lui trouver autre chose, non ?"

Un regard vers la vendeuse qui nous écoutait, me fit sourire de plus belle.

"En même temps, nous sommes toutes complexées par quelque chose... Vous, par exemple... Il doit s'agir de vos cuisses."

La vendeuse se mit à rougir, balbutia un "non pas du tout" avant de reporter son intérêt sur autre chose que les deux seules clientes qu'elle avait dans sa boutique.

Ruika semblait être en désaccord avec ce choix. Elle m'expliqua que Shimizu avait probablement honte de son corps, en mentionnant leur rencontre au rotenburo et... je scrutai le pull que je venais de sortir et me rendis compte de mon erreur. En effet, on ne verrait presque plus la belle jeune femme sous ce pull large, qui était en plus de la même couleur que sa chevelure. Cela aurait été dommage, compte tenu de sa grande timidité. Je comprenais ce genre de réaction, le fait de vouloir se cacher, parce que j'étais le genre de fille qui ne voulait parler à personne de peur de faire une erreur. Je pensais bien que si l'occasion s'en présentait, la gérante se protégerait de cette manière. J'étais gênée par ma maladresse... décidément, j'étais forte pour ce genre de choses. Il fallait aider Shimi', et pour l'aider, je devais remettre ce pull à sa place. Ce que je fis avec empressement. La jeune brune jeta un regard à la vendeuse qui laissait traîner une oreille indiscrète, et fit un large sourire en disant:


"En même temps, nous sommes toutes complexées par quelque chose... Vous, par exemple... Il doit s'agir de vos cuisses."


J'entendis de loin la jeune femme marmonner un "Non, pas du tout..."

Ma gêne s'envola d'un coup, et je m'esclaffai. Ruika était vraiment géniale! Je l'adorais déjà, comme Shimizu et Haiko d'ailleurs. Je me devais de trouver quelque chose de correct, sinon je m'en voudrais pendant longtemps. Je courus partout et sortis une robe, un jean, une jupe plissée, une veste, un collier... Bon, maintenant, il fallait choisir. Qu'est-ce que j'allais bien pouvoir acheter?

"Ruika? Tu... tu veux bien m'aider à trier tout ça? Enfin je veux dire.. je n'ai pas envie de refaire une boulette du genre..."

Ohlala... j'étais vraiment nulle... Je connaissais trop bien cette sensation pour l'ignorer. Je baissai mon regard doucement et fixai mes bottes. Mais... non, non, trop facile ! Je devais absolument me ressaisir, c'était important et ça faisait partie de mes objectifs. Avoir confiance en moi. Je relevai la tête et souris. Voilà. J'y arriverai, je m'en faisais la promesse ! Mais pour l'instant, je devais m'occuper de ce fameux cadeau.

"Bon allez, c'est parti!"

Suivant Lenalee dans les divers rayons de la boutique, je la vis prendre bon nombre de choses. Mon sac contenant mon écharpe se balançait au rythme de mes pas plutôt rapides. Nous arrivâmes toutes deux, au présentoir contenant les bijoux et là encore, Lenalee la tornade comme mon esprit la surnommait, attrapa un collier avant d'atteindre le comptoir où la vendeuse lançait un regard ébahi par la vitesse de la jeune cliente. Déposant le tout, elle s'adressa enfin à moi, me proposant de trier avec elle, ses choix. Je pris la jupe plissée et l'installais près de la mienne.

"Je ne sais pas si cela lui ira... Je crois bien que je suis la seule à porter, encore et encore, mon uniforme de lycée..."

Je souris. La jupe un peu plus courte que la mienne me laissa fantasmer sur la peau de la gérante. Ah ! Que m'arrivait-il ? Pourquoi pensais-je encore à Shimizu ? J'étais pourtant hétéro jusqu'à maintenant. Pourquoi est-ce que cela changerait ? Je devais me ressaisir avant de finir par me taper le crâne contre un mur. Je repensais à la sortie avec Haiko, à ce délinquant qui m'avait embrassé, à cette virée au karaoké, au corps d'Haiko dénudé...
Pensive, je reposais la jupe pour opter pour le collier.

"Le collier, pour moi... C'est pas franchement le cadeau qu'on s'offre entre filles... Enfin... J'imagine plutôt... Une soirée au restaurant avec un homme pour noël ou pour mon anniversaire et, alors qu'il me ramène jusqu'à ma demeure, il passe sa main dans ses poches, hésitant sur le moment où il m'offrira ce bijou... Puis, on arrive devant la porte et là, il me demande de fermer les yeux. Il retire doucement mon écharpe, soulève délicatement mes cheveux, fait glisser sur mon cou le collier et l'attache avant de me demander d'ouvrir les yeux. Je me retrouve face à lui et forcément, je l'embrasse puisqu'un tel cadeau a l'air onéreux..."

J'étais encore partie ailleurs. Je secouais la tête avant de reporter mon attention sur le collier.

"Tu vois ce que je veux dire..."

Je fis un grand sourire, frottant l'arrière de ma tête, légèrement gênée d'avoir du expliquer ceci à une personne de mon âge. Enfin, je reposais le collier.

Bon, je savais que choisir entre tous ces articles ne serait pas simple, mais si Ruika m'aidait, ça allait sûrement être plus facile. J'étalai ce que j'avais pris sur le comptoir, et brandis les articles un par un. Je vis la belle brune saisir la jupe et la comparer avec la sienne... hum, elle était très courte. Je n'aurais peut-être pas dû la prendre, sachant que Shimizu n'oserait certainement pas l'enfiler, et encore moins se promener avec. Tout de même, j'aurais bien aimé la lui offrir. Ruika confirma ce que je pensais :

"Je ne sais pas si cela lui ira... Je crois bien que je suis la seule à porter, encore et encore, mon uniforme de lycée..."

Ah. Je vois. Si personne d'autre qu'elle ne portait de vêtement aussi court, il y avait très peu de chances pour que Shimi' la mette. Donc, pas de jupe. Dommage. Ce fut ensuite au tour du collier d'être analysé. Mon interlocutrice scruta le collier en réfléchissant, et donna son avis:

"Le collier, pour moi... C'est pas franchement le cadeau qu'on s'offre entre filles... Enfin... J'imagine plutôt... Une soirée au restaurant avec un homme pour noël ou pour mon anniversaire et, alors qu'il me ramène jusqu'à ma demeure, il passe sa main dans ses poches, hésitant sur le moment où il m'offrira ce bijou... Puis, on arrive devant la porte et là, il me demande de fermer les yeux. Il retire doucement mon écharpe, soulève délicatement mes cheveux, fait glisser sur mon cou le collier et l'attache avant de me demander d'ouvrir les yeux. Je me retrouve face à lui et forcément, je l'embrasse puisqu'un tel cadeau a l'air onéreux..."

C'était très beau, dit comme ça. Mais cela voulait aussi dire... pas de collier. Elle secoua la tête comme pour se contredire. Elle mit le collier de côté, près de la jupe, et se gratta la tête en souriant.

"Tu vois ce que je veux dire..."

Je voyais, oui. Elle avait l’air gêné, mais ce qu’elle venait d’expliquer… oui, j’aurais dû comprendre avant. Je n’avais pas pensé à ça. Alors je répondis joyeusement :

"Oui je vois! Ca nous fait toutes rêver… Enfin… Bref. Que dis-tu de celui-là ?"

Je pris un jean bleu foncé, un peu délavé au niveau des cuisses. Il était joli, et je me demandai si c’était un cadeau approprié en attendant l’avis de Ruika. Il me semblait bien pour notre gérante, d’après ce que je connaissais de ses préférences. Pas parfait, mais très joli. Il ne me restait plus qu’a écouter le verdict.

Lenalee me montra ensuite un jean. Elle avait auparavant annoncer que la situation exposée lorsque je tenais le collier, nous faisait toutes rêvée. J'avais détournais les yeux. Ce genre d'attention, ne me plaisait pas vraiment mais, mon imagination avait fait des siennes plus d'une fois. D'ailleurs, le baiser serait perçu comme un remerciement du cadeau et donc, il ne serait pas forcément sincère, pour moi... Je reportais mon regard sur Lenalee qui tenait le jean. Je ne connaissais pas vraiment la taille de Shimizu en matière de vêtements si ce n'est sa poitrine que j'avais touché et vu sous divers angle. Je hochais négativement la tête.

"Tu connais sa taille ?"

J'espérais une réponse affirmative car, si Lenalee connaissait cela, elle pourrait choisir n'importe quel vêtement. D'après moi, une écharpe ou un sac aurait convenu mais, la blonde devait avoir envie de lui offrir un vêtement. Peut-être pour lui emprunter par la suite, qui sait ! Je me mis à rire doucement en imaginant si elle ne connaissait pas la taille, une Shimizu dans un vêtement trop grand ou trop petit.

Je ne m’étais pas rendue compte de ce que je venais de dire, et je me sentis bien idiote tout à coup. Ruika tournait la tête vers le vide de l’allée qui se situait à côté de nous. Mince, il fallait que je trouve un moyen d’effacer ce malaise. Mais comment ? Je ne bougeai plus, en attendant une réaction de la part de la jeune fille. Je ne savais vraiment pas quoi dire, et j’avais la terrible impression d’être une petite fille. Je n’arrivais pas à gérer cet aspect de ma personne. Je réagissais souvent d’une façon enfantine, parce que je ne voulais pas paraître supérieure ni orgueilleuse par rapport aux autres adultes, et je m’étais toujours considérée comme insignifiante. En fait, c’était surtout un problème de confiance. D’ailleurs si ça se trouvait, Ruika n’avait pas pensé cela à propos de moi. Ou avait peut-être remarqué ce trait de caractère. Interrompant ma réflexion, elle me regarda et hocha la tête de gauche à droite.

"Tu connais sa taille ?"

Et zut… il y avait à peine quelques heures que j’avais rencontré Shimi’, donc connaître sa taille. Et si je prenais la mauvaise taille ? Trop petit ? Trop grand ? Je me remémorai l’apparence de la gérante et répondis :

"Je n’en sais vraiment rien, mais elle ne doit pas dépasser le 36… donc… reste à voir entre un 34 et un 36. Je me trompe ?"

Je vérifiai la taille inscrite sur le jean : « 34 »
Ok, je devais donc aller chercher un autre article. Je courus à toute vitesse vers le rayon et en deux temps trois mouvements, le deuxième exemplaire était sur le comptoir. Je cherchai la vendeuse du regard, et remarquai qu’elle était dans l’arrière boutique. Elle devait être très fatiguée, elle aussi. Il me sembla que Ruika et Shimizu faisaient à peu près la même taille, alors je demandai :

"Tu fais la même taille que Shimi’ ? Enfin je veux dire… si on veut que ça lui aille, tu devrais peut-être les essayer, non ? Qu’est-ce que tu en penses ?"

J'espérais ne pas avoir fait de gaffe comme j'avais l'habitude de le faire.

Lenalee supposa alors la taille de la jeune fille. Un 34 ou un 36. Dommage. Il fallait éviter les vêtements où une taille apparaissait. Mon sac contenant mon écharpe toujours dans la main, j'eus l'idée d'offrir un accessoire à la gérante. Encore devais-je aborder le sujet à Lenalee. Cette dernière avait empoignée le jean pour vérifier la taille. Alors que je m'apprêtais à lui parler d'écharpe et à reporter son attention sur le collier ou une paire de gants, la blonde s'était précipitée dans les allées de la petite boutique, manquant renverser quelques portants sur son passage. Elle posa un jean identique sur le comptoir. La regardant avec de grands yeux ronds tellement la surprise m'avait envahie en la regardant faire, je me mis à rire en revoyant la scène avec l'air de « benny hill ».

"Tu fais la même taille que Shimi’ ? Enfin je veux dire… si on veut que ça lui aille, tu devrais peut-être les essayer, non ? Qu’est-ce que tu en penses ?"

Je cessais un instant de rire. Oui, je devais rentrer dans un 36. Pas dans un 34. Mais, de là à faire la taille de Shimizu, j'en doutais fortement.

"Tu ne préfères pas opter pour quelque chose en taille unique ? Il y aura moins de risque au niveau des tailles..."

Je jetais un regard rapide à ma montre avant de retourner dans les yeux de Lenalee puis, vers le collier.

Ruika me proposa rapidement de prendre un accessoire, l’usage des tailles étant risqué. En y repensant, il était vrai que je pouvais tout aussi bien me tromper... Je réfléchis à un article qui correspondrait bien à notre gérante. Je me souvins malgré mon rapide passage de ce côté de la boutique que le rayon « accessoires » comportait  des  bonnets, écharpes, des sacs, et des bijoux. Un peu comme tous les rayons du genre, finalement. Mais il fallait faire vite, la vendeuse en avait sûrement déjà marre de nous voir rester si longtemps, alors qu’elle voulait juste se reposer. Je décidai d’aller y jeter un coup d’œil et tombai sur les bonnets.

"Tiens… ils sont jolis !"

J’en pris un dans chaque main, et les observai longuement. L’un était d’un joli bleu ciel, avec un pompon, l’autre était bordeaux avec des petits fils brillants par-ci par-là. Alors… un rapide regard vers les autres, et je pensai qu’il fallait choisir entre les deux. Je devais pouvoir me débrouiller toute seule. Celui-ci ou celui-là ? Bleu ou rouge ? Hum... le rouge ! Oui, il était parfait ! Je revins vers Ruika et brandis ma trouvaille :

"Ta-dam !! J’ai trouvé ça ! J’espère que ça lui plaira…"

Je me décidai à agir, parce que je n’avais pas le courage de chercher autre chose s’il s’avérait que j’aie fait le mauvais choix. Il me semblait que c’était un très joli cadeau, alors je déposai l’article sur le comptoir et payai. La vendeuse semblait rassurée que nous ayons enfin trouvé un cadeau qui convenait. Quant à moi, je priais pour avoir eu une bonne intuition.

Lenalee, puisque tel était le nom de la demoiselle, refit un petit tour de la boutique du côté des accessoires. Elle attrapa deux bonnets et, je souris en imaginant deux marionnettes à ses mains. L'une dirait :"choisis moi !" tandis que l'autre sortirait : "non moi ! je suis plus doux et plus sympa en couleur que lui !". Mon imagination refaisait des siennes. Elle en délaissa un, optant pour un rouge vif. Ainsi, Shimizu deviendrait pour moi, le grand schtroumpf si elle se revêtait de bleu. La demoiselle me brandit l'article qui me fit sourire. Hors de question pour moi de faire une réflexion. J'étais en retard pour mon Karaoké, je n'allais pas encore démolir le choix de Lenalee. Surtout que je ne voyais pas Shimizu porter uniquement du bleu.
Quoiqu'il en soit, elle acheta le bonnet au soulagement de la vendeuse et j'ouvris la porte de la boutique afin de faire sortir Lenalee. Une fois dehors, je remarquais les lumières qui tarissaient sur les devantures des magasins. Tous ou tout du moins, une grande partie allait fermer leur porte. D'ailleurs, la vendeuse sortit peu de temps après nous pour verrouiller les grilles métalliques.

"Je vais faire une partie du chemin avec toi, si tu veux."

Je souris. Ah ! Oui ! Je devais lui parler du bonnet et la complimenter sur son choix.

"Il est sympa le bonnet que tu as choisi ! Ah ! Ne t'inquiétes pas, je ne dirais rien à Shimi' !"

Mon choix fit sourire Ruika. Je souris aussi, heureuse d’avoir enfin trouvé un cadeau qui convenait. Quand je sortis de la boutique après la jeune femme qui m’ouvrait la porte, j’entendis le soupir de la vendeuse. Je m’écriai tout en faisant un signe de la main :

"Au revoir madame ! Et merci !"

Le froid me saisit et je frissonnai. Toutes les lumières et les décorations s’éteignaient petit à petit, chacune leur tour, dans les boutiques. Il devait être tard… mais… avec ce qu'il s’était passé, j’avais oublié que je ne saurais pas retrouver mon chemin. Quelle idiote je faisais ! Je me frappai le front et regardai Ruika. Je me préparai à lui demander si elle rentrait à la pension mais elle me devança  en me proposant de  faire une partie du chemin avec moi. Elle avait lu dans mes pensées ou quoi ? J’étais contente qu’elle se soit proposée pour m’accompagner... je ne me voyais pas me perdre dans les rues en pleine nuit. Je lui répondis, reconnaissante :

"Merci, c’est gentil ! Je crois que je ne me souviens plus du chemin que j’ai emprunté pour venir et je n’ai aucun sens de l’orientation…"

Puis, pendant que nous marchions, elle me donna son avis sur le cadeau et je souris à nouveau.

"J’espère vraiment que ça lui plaira… mais oui, je te fais confiance Ruika !"

Je continuai à suivre la jeune brune en silence, en me remémorant les dernières heures de cette journée.

Je marchais à côté de Lenalee, consciente que nous arriverions bientôt au pont et qu'il me faudrait la quitter là, afin de ne pas être en retard à mon travail. Mon sac contenant mon achat se balançait au rythme de mes pas et bien que la température extérieure ait baissée de quelques degrés, je n'allais pas porter mon écharpe immédiatement. J'aurais pu d'ailleurs la proposer à celle que je raccompagnais puisqu'il me sembla la voir frissonner mais, l'accepterait-elle ? Et que ferais-je s'il faisait encore plus froid lorsque je sortirai du karaoké ? Bah... Après tout, je ne risquais rien hormis un bon rhume. Je tournais mon visage vers celui de la petite blonde pour finalement reporter mon attention sur le chemin. Je n'avais pas grand chose à lui dire et, un énième coup d'oeil à ma montre me fit presser légèrement le pas. J’espérais qu'elle me suive mais, j'avais un peu peur qu'elle finisse par se perdre, aussi, j'attrapais sa main pour l'entrainer dans ma cadence.

Le pont. Au bout de celui-ci, l'ombre de la pension Hinata se dessinait et de la lumière se dégageaient de certaines fenêtres. Je me stoppais. Pour moi, le chemin allait être différent.

"Lenalee, en continuant tout droit, tu arriveras à la pension. Je suis désolé, je ne peux pas aller plus loin, je suis attendue et je vais être en retard."

Enfin, après avoir joint mes mains pour m'excuser convenablement, je lui adressais un sourire confiante avant de tourner les talons. Je me mis à courir vers ma destination tandis qu'un regard en arrière me laissa voir Lenalee au milieu du pont. Elle s'éloignait donc, elle aussi.